La sélection courts-métrages documentaires des Césars, ranimée en 2022 après une fermeture qui a duré depuis 1991, produit un contraste saisissant avec les fictions longues de la compétition pailletée. Ouverte aux expérimentations formelles, aux questionnements politiques et à la jeune création, elle compte parmi les films choisis plusieurs raisons de se réjouir de sa réouverture. Écoutez le battement de nos images d’Audrey et Maxime Jean-Baptiste en fait partie. Les deux cinéastes, frère et sœur, (...)
Débordements est une revue en ligne de cinéma (critique / recherche / traduction).
Articles les plus récents
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Audrey et Maxime Jean-Baptiste
22 février, par Occitane Lacurie et Barnabé Sauvage -
D’un spectateur l’autre
22 février, par Théo Charrière§ 1. Médiations
C’est une scène comique de The Fabelmans : la première petite amie de Sammy, idolâtre du Christ, va le convoquer en prière pour supporter le poids d’un premier échange amoureux. La séquence se construit ainsi sur un enchaînement de blasphèmes visuels (l’intégration, par l’effet d’un zoom arrière, des figures du Christ dans une série de portraits de chanteurs, la brève confusion entre entrée en prière et fellation, etc.) qui tendent à faire du Christ non le visage visible du Fils comme le (...) -
La Femme de Tchaïkovski, Kirill Serebrennikov
22 février, par Barnabé SauvageMoscou, 1894. Au milieu d’une pièce sombre et miteuse, déjà presque entièrement vidée, un piano quart de queue recouvert d’un drap blanc est difficilement soulevé par une bande de gaillards qui s’échinent à le faire passer par l’embrasure d’une fenêtre. Soudain une femme éplorée jaillit du hors champ, se précipite sur l’instrument – « Attendez ! » – en relève juste assez le couvercle du clavier pour jouer, sur une seule touche, la mélodie inarticulée de son tourment pendant que les dix porteurs maintiennent le (...)
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Interdit aux chiens et aux Italiens, Alain Ughetto
15 février, par Florent Le DemazelInterdit aux chiens et aux Italiens se présente comme une enquête, à la fois intime et sociologique, dans laquelle le cinéaste remonte aux origines de sa famille, partie d’un petit village du Piémont pour s’installer en France. D’emblée, Alain Ughetto se confronte à une vaste question historiographique : comment raconter la vie de celles et ceux qui ne laissent pas de traces ? Et même, des invisibles au carré : en Italie, d’abord, qu’ils ont quitté sans bruit, et avec la bénédiction des pouvoirs en (...)
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Knock at the Cabin, M. Night Shyamalan
15 février, par Pierre Jendrysiak« La certitude est, pour ainsi dire, un ton de voix dans lequel on déclare comment sont les choses, mais on ne conclut pas de notre propre ton de voix qu’il est fondé. [… ] Celui qui voudrait douter de tout n’arriverait jamais au doute. Le jeu de douter présuppose lui-même la certitude. » Ludwig Wittgenstein, De la certitude (§30, §115)
« In the day-to-day trenches of adult life, there is actually no such thing as atheism. There is no such thing as not worshipping. Everybody worships. The only choice (...) -
Ashkal, l’enquête de Tunis, Youssef Chebbi
8 février, par Florent Le DemazelLa magistrale réussite d’Ashkal tient en ce qu’il parvient à être tout à la fois un bon film de genre et un bon film politique. Soit un film policier qui traite moins de l’enquête en elle-même que de la place de la police dans son univers fictionnel, la Tunisie contemporaine. Le suspens inhérent à ce type de films vient alors, de plus en plus, du faisceau de tensions qui saturent le monde social, à commencer par ses deux protagonistes principaux.
Au lieu de l’archétype good cop / bad cop ou du vieux (...) -
La Montagne, Thomas Salvador
8 février, par Hugo KramerLa Montagne c’est avant tout une promesse. Celle de substituer au quotidien aseptisé une aventure intrépide. Une irrépressible pulsion pousse Pierre (Thomas Salvador), après un exposé commercial au pied du Mont Blanc, à prolonger son séjour. Ingénieur, il est venu présenter un bras robotique notamment capable de reproduire une trajectoire effectuée à vide. Le mouvement que lui a indiqué la main humaine s’inscrit dans sa mémoire, et il ne lui reste plus qu’à tournoyer. Mais le regard de Pierre s’absente, (...)
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Tár, Todd Field
8 février, par Barnabé Sauvage, Pierre JendrysiakSorti il y a plusieurs mois aux Etats-Unis et il y a deux semaines en France, le nouveau film de Todd Field n’a toujours pas fini de déclencher des discussions, des débats, des polémiques qui seront peut-être relancées par sa possible consécration aux Oscars dans quelques semaines. Il est rassurant, dans un monde post-COVID où le cinéma s’interroge et où les films semblent passer les uns après les autres et disparaître trop vite, de trouver un objet clivant, tordu, difficile à approcher : Tár est de (...)
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Débordements_17.pdf
8 février, par Occitane LacurieIl ne sera pas ici question du destin du cinéma, du destin des images, du destin de notre regard qui se perd dans l’obscurité proverbiale de la salle, où la subjectivité s’efface sous les assauts hypnotiques des visages qui s’étalent sur la toile, de l’aventure sensorielle de haute voltige que seul saurait procurer le velours élimé d’un fauteuil rouge et la promesse que quelque part, dans ce rayon de lumière au-dessus de nos tête, se cachent – parmi les grains de poussière en suspension dans l’air – les (...)
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Babylon, Damien Chazelle
1er février, par Florent Le DemazelUn éléphant juché sur un camion, coincé au milieu d’une côte un peu trop raide, ouvre grand ses sphincters et se vide sur la caméra – et accessoirement sur un factotum mettant ses dernières forces à pousser le véhicule. Il n’est pas difficile de voir dans cette scène un condensé de Babylon tout entier, qui déverse sur son spectateur tout au long de ses trois heures d’hystérie cocaïnée tous les fluides imaginables : pisse, sang, sueur, et autres douches d’alcool et de dégueulis. C’est qu’à travers ces (...)